L’embauche directe de travailleurs étrangers en principe et en pratique

L’embauche directe de travailleurs étrangers en principe et en pratique

L’emploi de travailleurs étrangers pour pallier la pénurie de main-d’œuvre notamment, est strictement encadré par la législation française [code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (Cedesa) et code du travail], qui distingue 2 grandes catégories de travailleurs

  • Les ressortissants de l’Union européenne (UE) et assimilés.
  • Ceux de pays tiers.

Cas n°1 : Ressortissants communautaires et assimilés – libre circulation

Les ressortissants des pays ci-après peuvent travailler librement en France sans autorisation préalable :

  • Pays membres de l’Union européenne (UE), composée actuellement de 27 pays dont la France :

Allemagne, Autriche, Belgique, Bulgarie, Chypre, Croatie, Danemark, Espagne, Estonie, Finlande, Grèce, Hongrie, Irlande, Italie, Lettonie, Lituanie, Luxembourg, Malte, Pays-Bas, Pologne, Portugal, République tchèque, Roumanie, Slovaquie, Slovénie et Suède.

  • Pays appartenant à l’Espace Économique Européen (EEE), soit les 27 pays membres de l’UE + 3 autres :

Islande, Norvège, Liechtenstein.

  • Confédération suisse.
  • Monaco, Andorre, République de Saint-Marin (pour ces pays, une convention bilatérale prévoyant un régime spécifique en matière de travail a été signée avec la France).

Que doit faire l’employeur ?

Il doit demander au ressortissant européen de présenter l’original d’un document d’identité en cours de validité prouvant sa nationalité (carte nationale d’identité ou passeport).

Cas n°2 : Ressortissants de pays tiers – encadrement strict

Les étrangers non-européens ou assimilés doivent détenir une autorisation de travail, quelle que soit la nature ou la durée du contrat de travail, laquelle peut prendre différentes formes : carte de résident, carte de séjour temporaire salarié…

L’autorisation de travail peut être limitée à certaines activités professionnelles ou zones géographiques. L’employeur se doit de les respecter.

Certains titres de séjour, énumérés par le code du travail, valent autorisation de travailler en France et dispensent de recourir à une autorisation spécifique de travail (carte de résident, par exemple). Par ailleurs, une demande d’autorisation de travail n’est pas à effectuer dans certaines situations (séjour de moins de 90 jours et activité salariée envisagée ressortant de domaines tels que les manifestations sportives, culturelles, artistiques et scientifiques ou encore, les colloques, séminaires et salons professionnels).

Précisons ici qu’à une exception près, la demande d’autorisation de travail est effectuée par l’employeur selon le code du travail, étant ici précisé qu’il doit répondre à plusieurs conditions (respect de ses obligations sociales, entre autres). La demande d’un titre de séjour, elle, est réalisée par l’étranger auprès de la Préfecture compétente, conformément au Cedesa. Les dispositions des 2 codes doivent donc se combiner.

Que doit faire l’employeur ?

Lorsque l’étranger réside déjà en France :

Nous n’abordons ici que les hypothèses dans lesquelles le candidat étranger est, a priori, en situation régulière en France, c’est-à-dire qu’il dispose d’un titre de séjour en cours de validité.

  • Si son titre de séjour vaut autorisation de travail, l’employeur doit en vérifier l’authenticité auprès de la préfecture du siège de l’entreprise, au moins 2 jours ouvrables avant l’embauche.

Pour le Maine-et-Loire, la demande de vérification est à effectuer par courrier électronique à pref-employeurs-etrangers@maine-et-loire.gouv.fr, précisant les nom et prénom du demandeur, ses date et lieu de naissance, accompagné de la copie recto-verso du titre de séjour et du document d’identité présenté par l’étranger. A ce propos, compte tenu des fraudes, il est fortement recommandé à l’employeur de demander à voir les originaux.

Le préfet a 2 jours pour répondre. Sans réponse, la démarche est considérée comme accomplie.

L’employeur est dispensé de cette vérification si l’étranger est inscrit comme demandeur d’emploi auprès de France Travail.

Il doit demander le justificatif d’inscription à France Travail, téléchargeable par le demandeur d’emploi étranger à partir de son espace en ligne.

  • En revanche, si le candidat étranger dispose d’un titre de séjour ne lui permettant pas de travailler en France ou s’il est placé dans certaines situations professionnelles (étranger détenteur d’une carte de séjour «travailleur temporaire» changeant d’emploi, par exemple), l’employeur devra déposer une demande d’autorisation de travail, avec ou sans opposabilité de la situation de l’emploi (voir ci-après), selon les cas.

Pour les salariés ne résidant pas en France :

Le projet de recrutement d’un collaborateur étranger, hors ressortissant UE et assimilé, non présent en France, dite procédure d’introduction, nécessite une autorisation de travail avec opposabilité de la situation de l’emploi, c’est-à-dire que l’employeur doit procéder à une publicité préalable de l’offre d’emploi, sauf exception.

L’offre d’emploi doit être publiée, pendant une durée de 3 semaines consécutives, dans les 6 mois précédant le dépôt de la demande d’autorisation, auprès d’un organisme participant au service public de l’emploi (France travail, APEC,…). Comme toute offre, elle contiendra au minimum les mentions obligatoires prévues par la loi, à savoir : l’intitulé et le descriptif du poste, le lieu de travail, le type et la durée du contrat, l’expérience requise pour le poste, la référence de l’offre et sa date de publication. Précisons ici que certaines mentions sont proscrites, notamment celles qui induisent une forme de discrimination telles que la religion, les origines, l’âge, l’état de santé ou la situation familiale. Si aucun demandeur d’emploi ne satisfait à l’offre alors l’employeur peut procéder à la demande d’autorisation de travail.

Par exception, l’employeur pourra effectuer une demande d’autorisation de travail de suite si l’emploi proposé relève de la liste des métiers en tension ; celle-ci indique région par région les métiers pour lesquels se posent des difficultés de recrutement (Notons ici qu’un citoyen algérien ne peut bénéficier de cette exception). La dernière en date a fait l’objet de l’arrêté du 21 mai 2025 que vous pourrez retrouver en intégralité en suivant le lien au bas du présent article.

La demande s’effectue auprès de la Préfecture par le dépôt d’un dossier, uniquement par le téléservice https://administration-etrangers-en-france.interieur.gouv.fr. La procédure se déroule en 8 étapes au cours desquelles seront à communiquer les informations relatives à l’établissement employeur, au type de recrutement souhaité (CDD, CDI), au futur salarié, à l’emploi proposé. Des justificatifs, dont la liste est précisée sur le site, seront à joindre (par exemple, si une offre d’emploi devait être publiée, plusieurs documents seront à fournir, comme une attestation du dépôt de l’offre d’emploi auprès d’un organisme du service public de l’emploi et de sa publication pendant trois semaines et un document établi par l’employeur mentionnant le nombre de candidatures reçues et attestant de l’absence de candidat répondant aux caractéristiques du poste de travail proposé).

Si elle fait l’objet d’une instruction favorable, l’employeur et le bénéficiaire recevront l’autorisation de travail sécurisée par mail.

Le travailleur étranger joindra alors cette autorisation de travail à son dossier de demande de titre de séjour.

Quelles sont les autres formalités que doit accomplir l’employeur ?

  • Acquittement d’une taxe spécifique

L’employeur est redevable d’une taxe en cas de délivrance d’une autorisation de travail, soit à la 1ère entrée en France du salarié étranger, soit à la 1re admission au séjour pour l’exercice d’une activité professionnelle salariée, sauf exonération.

La taxe est due pour les autorisations de travail pour des durées supérieures à 3 mois, sauf pour les travailleurs saisonniers agricoles où elle est due dès le 1er jour.

Son montant dépend d’un certain nombre d’éléments : type et durée du contrat de travail, niveau de rémunération (par exemple, contrat de travail saisonnier : 50 € par mois d’activité salariée, complet ou incomplet, par contrat – Contrat de travail de 12 mois ou plus : pour un salaire inférieur à 4.504,50 €, 55 % du salaire mensuel brut).

Le paiement de la taxe employeur s’effectue avec celui de la TVA et des autres taxes mentionnées sur l’annexe à la déclaration de TVA, en fonction du régime d’imposition à ladite taxe de l’employeur.

  • Formalités de droit commun

Comme pour toute embauche, il faut réaliser une Déclaration Préalable à l’Embauche (DPAE), une visite médicale, l’immatriculation au régime de sécurité sociale, l’affiliation aux caisses (retraite, prévoyance), l’inscription sur le registre unique du personnel,…

À noter : le salarié étranger est en droit de demander la traduction de son contrat dans sa langue.

Un employeur peut-il être sanctionné s’il emploie un salarié étranger sans autorisation de travail ?

L’employeur risque des sanctions de différentes natures qui varient selon qu’il exerce son activité en tant que personne physique ou personne morale.

  • amende pénale,
  • peine de prison,
  • sanction administrative (amende, refus des aides publiques, remboursement, fermeture d’établissement,…),
  • peine complémentaires (confiscation des outils de production, exclusion des marchés publics,….).

La législation relative au travail des étrangers est relativement complexe et présente un grand nombre de particularités (demandeurs d’asile, par exemple), nous vous invitons donc à vous rapprocher de votre juriste en droit social pour tout conseil en la matière.

Source : Arrêté du 21 mai 2025 fixant la liste des métiers et zones géographiques caractérisés par des difficultés de recrutement en application de l’article L. 414-13 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, paru au Journal officiel du 22 mai 2025

https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000051643488

Pour la région des Pays de la Loire, en annexe I de l’arrêté, vous trouverez le tableau suivant présentant les familles professionnelles de métiers qui sont en tension :

Code FAP

Familles professionnelles

E2Z80

Agents de maîtrise et assimilés des industries de process

T4Z60

Agents d’entretien de locaux

A0Z40

Agriculteurs salariés

T2A60

Aides à domicile et aides ménagères

S1Z20

Aides de cuisine, apprentis de cuisine et employés polyvalents de la restauration

V0Z60

Aides-soignants

E0Z24

Autres ouvriers non qualifiés de type industriel

E1Z42

Autres ouvriers qualifiés des industries agro-alimentaires (hors transformation des viandes)

B6Z73

Chefs de chantier, conducteurs de travaux (non cadres)

N0Z91

Chercheurs (sauf industrie et enseignement supérieur)

S1Z40

Cuisiniers

A0Z41

Eleveurs salariés

S2Z60

Employés de l’hôtellerie

T1Z60

Employés de maison et personnels de ménage

B7Z91

Ingénieurs du bâtiment et des travaux publics, chefs de chantier et conducteurs de travaux (cadres)

M2Z90

Ingénieurs et cadres d’étude, recherche et développement en informatique, chefs de projets informatiques

B2Z40

Maçons

A1Z40

Maraîchers, horticulteurs salariés

T4Z62

Ouvriers de l’assainissement et du traitement des déchets

E0Z21

Ouvriers non qualifiés des industries agro-alimentaires

B0Z21

Ouvriers non qualifiés du gros œuvre du bâtiment

B3Z20

Ouvriers non qualifiés du second œuvre du bâtiment

B4Z44

Ouvriers qualifiés de la peinture et de la finition du bâtiment

B1Z40

Ouvriers qualifiés des travaux publics, du béton et de l’extraction

D1Z41

Ouvriers qualifiés travaillant par enlèvement de métal

A3Z40

Pêcheurs, aquaculteurs salariés

S2Z61

Serveurs de cafés restaurants

D2Z42

Soudeurs

L4Z81

Techniciens des services comptables et financiers

C2Z70

Techniciens en électricité et en électronique

D6Z70

Techniciens en mécanique et travail des métaux

G1Z70

Techniciens et agents de maîtrise de la maintenance et de l’environnement

A1Z42

Viticulteurs, arboriculteurs salariés

À ces familles professionnelles, répertoriées par code et libellé, correspondent des métiers référencés dans le Répertoire Opérationnel des Métiers et des Emplois (ROME) comme indiqué dans la table de l’annexe II de l’arrêté.

Prenons 2 exemples :

  • À la famille professionnelle A1Z40, Maraîchers, horticulteurs salariés, correspond la fiche ROME A1414, Horticulture et maraîchage, répertoriant les métiers de Chef de culture horticole, Chef de culture maraîchère, Ouvrier / Ouvrière de culture maraîchère, Ouvrier / Ouvrière champignonniste,…
  • À la famille professionnelle S2Z61, Serveurs de cafés restaurants correspond la fiche ROME G1801, Café, bar brasserie, répertoriant les métiers de Barman / Barmaid, Commis / Commise de bar, Garçon / Serveuse de café, Serveur / Serveuse de bar-brasserie,…